La Cour confirme que le marquage des agrumes indiquant les agents conservateurs et autres substances chimiques utilises en traitement post-recolte est obligatoire

La Cour considère que le Tribunal n’a pas commis d’erreur en rejetant le recours introduit par l’Espagne

Une disposition du droit de l’Union sur la commercialisation des agrumes (citrons, mandarines et oranges)1 dispose que les colis de ces fruits doivent porter un marquage indiquant, le cas échéant, les agents conservateurs ou les autres substances chimiques utilisés en traitement post-récolte2. Avec l’adoption de cette disposition, la Commission a voulu assurer l’application correcte de la législation de l’Union sur les additifs alimentaires. À cette fin, elle s’est écartée d’une norme3, non contraignante, adoptée par la CEE-ONU4 selon laquelle l’indication de l’utilisation de conservateurs ou d’autres substances chimiques n’est requise que si la législation du pays importateur l’exige.

Saisi par l’Espagne qui demandait l’annulation de cette disposition, le Tribunal de l’Union européenne a, dans un arrêt de 20145, rejeté le recours, considérant que : (i) la Commission n’était pas obligée d’adopter, au niveau de l’Union, une norme de commercialisation des agrumes identique à la norme CEE-ONU ; (ii) le principe d’égalité de traitement et de non-discrimination n’avait pas été violé, puisque, en ce qui concerne l’objectif d’informer les consommateurs sur les substances utilisées en traitement post-récolte, les producteurs d’agrumes se trouvent dans une situation différente de celle des producteurs d’autres fruits et légumes ; (iii) le principe de proportionnalité n’avait pas non plus été violé, étant donné que, en apercevant le marquage spécial des agrumes, les consommateurs ne parviendraient pas à la conclusion erronée que les fruits et légumes qui ne comportent pas un tel marquage n’ont pas été traités avec des substances chimiques et (iv) l’étiquetage relatif à l’éventuel traitement post-récolte des agrumes était nécessaire pour assurer une protection adéquate des consommateurs, sans qu’il soit acceptable de distinguer à cet effet entre les consommateurs qui se trouvent à l’intérieur et à l’extérieur de l’Union.

L’Espagne a introduit un pourvoi devant la Cour de justice pour faire annuler l’arrêt du Tribunal.

Par son arrêt de ce jour, la Cour rejette le pourvoi de l’Espagne dans sa totalité.

Selon la Cour, le Tribunal a, d’une part, suffisamment motivé son arrêt et, d’autre part, considéré à juste titre que la disposition en question était proportionnée au but poursuivi. La Cour confirme, à l’instar du Tribunal, qu’il est raisonnable que le consommateur soit averti du traitement des agrumes après leur récolte dès lors que, à la différence des fruits à pelure fine, ces agrumes peuvent être traités au moyen de doses beaucoup plus élevées de substances chimiques et que leur pelure est susceptible d’intégrer d’une manière ou d’une autre l’alimentation humaine. La Cour rappelle que les limites maximales applicables aux résidus de phényl-2 phénol (fongicide agricole utilisé pour cirer les agrumes) sont fixées à un niveau 50 fois plus élevé pour les agrumes que pour d’autres fruits6.

La Cour souligne aussi que c’est à juste titre que le Tribunal a considéré que l’examen d’un éventuel désavantage concurrentiel était inopérant dans le cadre de l’appréciation du respect du principe d’égalité de traitement, puisqu’il n’était pas de nature à remettre en cause le fait que les producteurs d’agrumes visés par la disposition litigieuse ne se trouvent pas dans une situation comparable à celle des producteurs d’autres fruits et légumes.

Par ailleurs, le fait que ni la législation spécifique sur les agents conservateurs et autres substances chimiques utilisés dans les traitements post-récolte ni la législation sur l’information du consommateur n’imposent un étiquetage particulier des pesticides utilisés dans les traitements agricoles n’a pas pour effet d’empêcher la Commission d’adopter une norme de commercialisation qui tient compte notamment de l’intérêt des consommateurs pour une information ciblée et transparente ainsi que des recommandations relatives aux normes CEE-ONU. En particulier, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que la Commission adopte une disposition prévoyant un étiquetage des agrumes portant mention des traitements appliqués après la récolte.

RAPPEL : La Cour de justice peut être saisie d'un pourvoi, limité aux questions de droit, contre un arrêt ou une ordonnance du Tribunal. En principe, le pourvoi n'a pas d'effet suspensif. S'il est recevable et fondé, la Cour annule la décision du Tribunal. Dans le cas où l'affaire est en état d'être jugée, la Cour peut trancher elle-même définitivement le litige. Dans le cas contraire, elle renvoie l'affaire au Tribunal, qui est lié par la décision rendue par la Cour dans le cadre du pourvoi.

Document non officiel à l’usage des médias, qui n’engage pas la Cour de justice. Le texte intégral de l’arrêt est publié sur le site CURIA le jour du prononcé. Contact presse: Gilles Despeux (+352) 4303 3205


 

1 Les pomélos, les pamplemousses et les citrons verts sont exclus du champ d’application de cette norme de commercialisation.
2 Partie B 2, point VI D, cinquième tiret, de l’annexe I, du règlement d’exécution (UE) n° 543/2011 de la Commission, du 7 juin 2011, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne les secteurs des fruits et légumes et des fruits et légumes transformés (JO L 157, p. 1). Le règlement 1234/2007 (règlement « OCM unique ») porte sur l’organisation commune des marchés dans le secteur agricole et les dispositions spécifiques en ce qui concerne certains produits de ce secteur.
3 Norme CEE ONU FFV 14 concernant la commercialisation et le contrôle de la qualité commerciale des agrumes.
4 Commission économique des Nations unies pour l’Europe. Cette commission rassemble actuellement 56 pays de l’Europe (y compris l’ensemble des États membres de l’Union européenne), de la Communauté des États indépendants et de l’Amérique du Nord. La CEE-ONU comporte, en son sein, le groupe de travail des normes de qualité des produits agricoles chargé, notamment, de la définition des normes communes pour les denrées périssables.
5 Arrêt du Tribunal du 13 novembre 2014, Espagne/Commission (T-481/11, voir CP n° 151/14).
6 Annexe II du règlement (CE) n° 396/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 23 février 2005, concernant les limites maximales applicables aux résidus de pesticides présents dans ou sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux d’origine végétale et animale et modifiant la directive 91/414/CEE du Conseil (JO L 70, p. 1).

Source : www.curia.europa.eu